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De combien devrais-je réduire mes emissions ?

Cet article a pour objectif de vous aider à définir vos objectifs de réduction d’émissions.

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Écrit par Riane
Mis à jour hier

Une fois les émissions de votre entreprise calculées, l’étape suivante consiste à agir pour les réduire. Pour ce faire, la plupart des entreprises fixent des objectifs de réduction des émissions : elles déterminent un niveau d’émissions cible, une échéance, et élaborent une stratégie pour l’atteindre.

Cependant, dans un contexte où les accusations de greenwashing sont de plus en plus fréquentes, le niveau d’ambition de ces objectifs est de plus en plus scruté.

Voici des éléments de contexte nécessaires pour vous aider à définir des niveaux de réduction des émissions suffisamment ambitieux.

1. La science

1.1 Au niveau global

Le changement climatique constitue une menace majeure pour nos modes de vie, notre espérance de vie et nos activités, en raison de l’augmentation de la fréquence et de l’intensité des événements climatiques extrêmes tels que les ouragans, les inondations et les sécheresses. (GIEC, 2022) Les dommages climatiques augmentent avec chaque tonne supplémentaire de CO2e dans l’atmosphère. Dans ce contexte, toute réduction des émissions, économiquement et socialement profitable, devrait être entreprise. (GIEC, 2022)

En raison des connaissances limitées sur les conséquences à long terme et indirectes du changement climatique, ainsi que des incertitudes sur les technologies futures, il n’existe pas de consensus économique clair sur les investissements nécessaires pour réduire les émissions. (Pindyck, 2013) Cependant, les modèles les plus récents et conservateurs (ne prenant en compte que les conséquences directes et connues) concluent que les sociétés doivent investir suffisamment pour limiter le réchauffement à 1,5 °C/2 °C. (Ueckerdt et al., 2019)

Pour limiter le réchauffement à une moyenne mondiale de 1,5 °C, la neutralité carbone globale doit être atteinte en 2050 (et en 2070 pour 2 °C), avec un dépassement limité ou inexistant. Cela nécessite des réductions substantielles des émissions (environ 90 % par rapport aux niveaux de 2010), car les solutions de capture et de stockage des émissions, basées sur la nature ou la technologie, auront une capacité limitée à ce moment-là. Ce défi se traduit par un budget carbone restant qui diminue chaque année. (GIEC, 2018)

Cependant, il faut garder à l’esprit que les modèles atmosphériques comportent des incertitudes. Bien qu’il existe une forte confiance dans l’effet de réchauffement des gaz à effet de serre, des boucles de rétroaction inconnues génèrent des variations dans les prévisions de hausse de température. Par ailleurs, diverses trajectoires d’émissions pourraient permettre d’atteindre la neutralité carbone globale, avec des implications différentes sur les niveaux totaux d’émissions de carbone au fil du temps. Enfin, il subsiste une incertitude quant à la capacité des technologies de capture du carbone à l’horizon 2050/2070. (GIEC, 2018)

L’objectif d’atteindre la neutralité carbone en 2050 ou 2070 est donc une simplification : en réalité, la neutralité carbone globale doit être atteinte entre 2040 et 2060 pour 1,5 °C, et les niveaux de réduction des émissions ne peuvent pas être fixés à un chiffre précis.

En 2018, le GIEC déclarait que « les émissions anthropiques mondiales nettes de CO2 devraient diminuer d’environ 45 % par rapport aux niveaux de 2010 d’ici à 2030 (intervalle interquartile de 40–60 %) et atteindre zéro net autour de 2050 (intervalle interquartile de 2045–2055) pour limiter le réchauffement moyen à 1,5 °C. Pour limiter le réchauffement en dessous de 2 °C […] les émissions de CO2 devraient diminuer d’environ 25 % d’ici à 2030 dans la plupart des scénarios (intervalle interquartile de 10–30 %) et atteindre zéro net autour de 2070 (intervalle interquartile de 2065–2080). » Cependant, puisque les émissions ont augmenté depuis 2018, ces objectifs doivent probablement être révisés à la hausse. (GIEC, 2018)

1.2 Au niveau des entreprises ou des outils

Le GIEC ne définit pas de recommandations spécifiques de réduction des émissions au niveau des entreprises ou des produits. Il évalue les potentiels de réduction des émissions et leurs coûts en fonction des recherches existantes, mais ne priorise pas certaines actions par rapport à d’autres. En particulier, bien qu’il identifie des secteurs clés où les émissions doivent être réduites, il ne fixe pas de cibles spécifiques à ces secteurs. (GIEC, 2022, voir les chapitres sectoriels)

La définition de cibles spécifiques par secteur nécessite de hiérarchiser les besoins et de prendre des décisions sociétales, telles que le niveau d’inégalités acceptable : plusieurs scénarios sont compatibles avec la neutralité carbone globale ou nationale. Ces choix doivent être démocratiques.

2. La réglementation

2.1 Au niveau global

L’Accord de Paris, signé en 2015, est un traité juridiquement contraignant visant à limiter le réchauffement à bien en dessous de 2 °C, idéalement 1,5 °C, par rapport aux niveaux préindustriels.

Les contributions déterminées au niveau national (NDC) permettent à chaque pays de définir ses engagements en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre et d’adaptation aux impacts climatiques.

2.2 Le cadre volontaire : l’initiative Science-Based Target (SBTi)

Pour combler les lacunes des réglementations, certaines entreprises ont choisi de prendre des mesures volontaires en fixant des objectifs certifiés par le SBTi. Cependant, les limites du cadre SBTi doivent être prises en compte :

  1. Les trajectoires proposées ne sont pas démocratiquement débattues.

  2. Les cibles SBTi pourraient être insuffisantes si les entreprises optent pour des stratégies minimales.

3. Conclusion

Bien que la science conclue qu’il est dans notre intérêt de limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C ou 2 °C et que la plupart des pays aient accepté cet objectif en signant l’Accord de Paris, les politiques mises en œuvre et les promesses actuelles restent insuffisantes pour atteindre les niveaux de réduction nécessaires. Ces politiques restent néanmoins essentielles pour garantir une transition juste et démocratique. En leur absence, des initiatives volontaires des entreprises, comme le SBTi, comblent le vide, mais elles peuvent s’avérer insuffisantes et quelque peu arbitraires. En l’absence d’alternative, suivre les recommandations du SBTi peut aider à fixer des objectifs compatibles avec l’Accord de Paris, mais il est important d’en connaître les limites !

La future CSRD pourrait aider à diversifier les objectifs disponibles pour les entreprises. Elle stipule : « L’entité doit indiquer si les objectifs de réduction des émissions de GES sont fondés sur la science et compatibles avec une limitation du réchauffement climatique à 1,5 °C. L’entité doit indiquer quel cadre et quelle méthodologie ont été utilisés pour définir ces objectifs, y compris s’ils sont dérivés d’une trajectoire sectorielle de décarbonation, quels sont les scénarios climatiques et politiques sous-jacents, et si les objectifs ont été validés par un tiers. » Cela suggère que d’autres scénarios que celui choisi par le SBTi pourraient être utilisés par les entreprises pour justifier leurs objectifs de réduction d’émissions. Toutefois, la manière dont cela sera audité reste incertaine.

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